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Les migrations peuvent-elles déboucher sur un changement en profondeur de la population ?


mardi 24 juillet 2018









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L’immigration a atteint une ampleur suffisante pour qu’on se doive d’en parler concrètement, sur la base des chiffres disponibles. La difficulté pour cela est que les statistiques en France sont de par la loi et les habitudes construites pour ne pas donner explicitement les données qu’il faudrait. Il est quand même possible sur la base des données disponibles de tirer certaines conclusions comme on va le voir.

La question est la suivante : est-il plausible et à quelles conditions qu’un jour la majorité de la population en France soit issue de l’immigration relativement récente et future, provenant de pays à cultures non-européennes, donc profondément différente (à forte dominante arabo-musulmane et africaine) ?

Que calculer ?

On raisonne souvent sur la population totale. Mais l’inertie démographique est telle que même si à partir de 2050 par exemple une majorité d’arrivants (naissances plus immigration) était d’origine étrangère, et que la tendance se prolongeait, il se pourrait que la majorité de la population ne bascule que plus de 40 ans après. Et a fortiori si on vise une majorité de la population adulte. Il paraît donc clair que le critère pertinent à prendre en compte est celui de ce qu’on appellera les arrivées : d’un côté l’immigration stable plus les naissances d’origine extra-européenne ; et de l’autre côté les naissances issues de parents de souche européenne (dont pour être rigoureux il faudrait retirer l’émigration nette). Car une fois que ce ratio a basculé, celui de la population n’est plus qu’une question de temps (long il est vrai, mais inéluctable).

Proposons donc à titre de réflexion un calcul simple. Prenons le point de départ déjà analysé dans un autre article : la proportion des naissances d’origine extra-européenne aujourd’hui, sur la base des chiffres de l’Insee (voir l’Incorrect N° 7, ou http://www.pierredelauzun.com/Migra....Pour résumer, en 2016 sur 783 640 naissances, 102 340 avaient un des deux parents né en dehors de l’Union européenne, et 58 375 les deux parents. Soit 160 715 dont au moins un des parents étaient nés hors d’Europe ; c’est-à-dire 20,5 %, un enfant sur 5 déjà. En 1998 la même proportion était de 11,5 % : un sur 9. On mesure l’accélération de l’évolution. Mais il ne faut pas oublier que parmi les parents nés en France, une proportion non négligeable est issue du même processus. Si donc on veut calculer le nombre et la proportion d’enfants d’origine extra-européenne proche, il faut ajouter une proportion non négligeable des parents nés en France (ou en Europe). Prenons une proportion proche de celle de 1998, soit 10 %. Cela ajoute pour 2016 10% des enfants non comptés dans le calcul ci-dessus, soit 62 295. La proportion des naissances d’enfants à ascendance non-européenne proche (pour un parent sur deux, ou pour les deux) passe alors à 28,5 % soit près de 30 % des naissances.

Peut-on alors faire des raisonnements sur l’évolution future ? Il est clair que seuls des démographes de métier, disposant des données nécessaires, peuvent faire ce travail de façon précise. Mon objectif ici n’est pas celui-là, mais de mesurer avec les données disponibles et moyennent des hypothèses plausibles s’il est possible par exemple en 2050 (dans 30 ans) d’avoir une majorité d’arrivées (naissances plus immigration) qui soit d’ascendance extra-européenne au moins en partie.

On trouver des données intéressantes et accessibles notamment chez Alexis Feertchak : http://www.lefigaro.fr/actualite-fr...

Ce que donne le calcul

Voyons maintenant le calcul. Au départ nous avons aujourd’hui environ 223 000 naissances extra-européennes au moins en partie (ci-après EE) et 560 600 naissances d’origine européenne (OE). Mais il y a aussi une immigration appréciable. Sur la base de 171 900 premiers permis de séjours en 2017 dont 43 % du continent africain, on arriver à 118 000 auxquels il faudrait ajouter les non-originaires d’Afrique. En comptant 120 000, on arrive donc à un total d’arrivées EE (naissances + immigration) de 343 000 et un total OE de 560 000 environ soit environ 38 % contre 62%. Notons qu’on ne tient alors pas compte ni de l’émigration européenne (par exemple vers les Etats-Unis ou en Grande-Bretagne, pas négligeables), ni des retours d’immigrés quand ils se produisent (a priori pas massifs).

Pour déterminer ensuite comment cela peut évoluer, il faut faire des hypothèses sur la natalité et sur les flux futurs d’immigration. Quand on regarde les chiffres Insee sur la natalité par région d’origine et les chiffres analogues à l’étranger, un taux de 2.8 enfants par femme EE serait assez plausible. Mais comme la descendance moyenne est désormais de 1.88 cela voudrait dire que les femmes OE ont une descendance de l’ordre de 1.5… Nous prendrons donc des chiffres plus prudents, tenant en outre compte du fait qu’une partie des EE a une origine mixte. Soit une descendance de 2.5 pour les EE et de 1.7 pour les OE. Ce qui signifie sur une génération une multiplication de la classe d’âge resp. par 1.2 et par 0.8 (si le seuil de renouvellement est de 2.1 enfants par femme : 2.5/2.1 et 1.7/2.1). Prenons ensuite une immigration stable à 120 000 par an. Supposons ensuite que ces trois chiffres ne bougent pas jusqu’en 2050, dans une génération. On supposera aussi pour simplifier que les deux populations restent distinctes. Les naissances EE passeraient alors à 408 000 environ (le chiffre initial de 343 000 arrivées, multiplié par 1.2), et celles OE à 454 000, encore en très légère majorité. Mais avec l’immigration supposée toujours à 120 000, on voit qu’il y aurait désormais une majorité d’arrivées EE de 563 000 (soit 54%).

Bien entendu encore cela suppose permanence des taux de natalité des diverses populations, et une immigration stable. il ne s’agit donc que d’un projection. Mais en faisant varier ces hypothèses, on constate qu’il n’y a des résultats vraiment différents que si d’une part la natalité locale (OE) remonte fortement, que celle EE baisse, et l’immigration de même. En prenant respectivement des descendances finales de 2.1 et 2.3 et une immigration ramenée à 50 000, on trouve en 2050 les proportions actuelles (62% d’arrivées OE). En d’autres termes la stabilisation de la composition de la population suppose à la fois le retour à une natalité équilibrée OE, une bonne assimilation des EE sur les mœurs des OE, et une réduction sensible de l’immigration. Ce qui est assez intuitif. Mais peu probable….

Inversement, une hypothèse où les OE verraient leur natalité se rapprocher du reste de l’Europe (1.5 de descendance finale) et l’immigration se relever à 200 000 ou plus (pression démographique galopante en Afrique) ferait passer la proportion d’arrivées OE à moins du tiers en 2050…

Signification

Naturellement ce calcul simplifié a ses limites et devrait être affiné. En particulier il faudrait tenir compte plus précisément de la présence d’un nombre important de couples mixtes, dont le comportement et l’appartenance peuvent aller dans les deux sens (mais nous en avons en partie tenu compte en prenant pour les EE un taux de natalité intermédiaire). Mais sauf à ce que ces estimations comportent des erreurs majeures (que dans ce cas on voudra bien nous signaler) qui en altéreraient significativement les conclusions, cela paraît montrer clairement que l’idée de remplacement n’est pas du tout irréaliste, même si dans ce calcul sommaire le basculement majoritaire de la population totale devrait sans doute attendre la fin du siècle.

Outre les facteurs signalés (fécondité, poursuite de l’immigration) beaucoup de la signification de ce phénomène majeur va dépendre du degré d’assimilation des EE. Car si celle-ci était parfaite et immédiate, ces calculs n’auraient pas beaucoup d’importance. Mais comme on sait on en est loin. La probabilité est une situation intermédiaire, encore renforcée par le nombre de couples mixtes, mais dans laquelle la proportion EE sera sans cesse croissante, et l’assimilation dès lors de plus en plus faible, en tout cas assezpartielle. Et donc, à terme long, si les facteurs démographiques ne changent pas, d’une part l’assimilation deviendra arithmétiquement assez improbable, et d’autre part la base politique potentielle pour changer cette évolution (par relance ciblée de la natalité, et arrêt des migrations) disparaîtra. Et dans ce cas le remplacement aura bien lieu.
















































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